LE ROMANTISME ÉCOLOGIQUE
- Olivier Martel, Artiste photographe

- 22 mai
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 13 août
Porter un regard sensible sur le monde

La Nature et les montagnes représentent, pour le photographe que je suis, un espace de contemplation et de résilience.
Si le romantisme pictural du XIXème siècle évoquait la contemplation d'une Nature toute puissante, le romantisme d'aujourd'hui évoque la prise de conscience de sa fragilité.
C'est ce que je définis comme le "romantisme écologique", une forme de romantisme contemporain qui interroge le rapport entre l’Homme et la Nature sous un nouvel angle.
C'est un moyen pour moi de conjuguer l'art, la sensibilité et l'engagement afin d'éveiller une conscience écologique.
Photographier un glacier, ce n’est pas seulement s'intéresser à sa beauté. C’est aussi entendre, dans son silence, le cri discret de sa disparition.
Mais comment une pratique artistique inspirée du romantisme peut-elle aujourd’hui nourrir une conscience écologique face à leur disparition ?
À travers l’héritage des peintres romantiques, l’expérience contemporaine de la nature dégradée, et l’engagement artistique comme acte de médiation, j’esquisse un début de réponse en image et en pensée.

I. Héritage du romantisme : la nature comme miroir de l’âme
Pour comprendre le romantisme écologique, il faut d’abord revenir à ses racines. Avant d’être écologique, ce regard est d’abord un regard esthétique et spirituel, hérité d’un temps où les artistes, face à la nature, interrogeaient leur propre place dans le monde.

Le romantisme pictural du XIXème siècle, incarné par des artistes comme Friedrich, Turner ou les Impressionnistes tardifs, naît d’un bouleversement : celui de la modernité naissante, de l’industrialisation, et de la perte d’un lien direct à la nature. Dans ce contexte, les artistes cherchent un refuge ou un contrepoint dans la grandeur des paysages.

Chez Friedrich, les cimes enneigées, les mers de brouillard, les arbres dépouillés ne sont jamais de simples décors : ils deviennent des symboles de l’âme humaine, des appels au recueillement et à l’éveil spirituel. L’homme romantique ne domine pas le monde, il s’incline devant lui.
Cette attitude me touche profondément. Elle fait écho à mon propre rapport à la montagne : je ne cherche pas à la conquérir, mais à l’écouter. À la photographier non pas comme trophée, mais comme présence vivante, fragile et souveraine.
Ce regard humble et contemplatif du romantisme, je le revendique encore aujourd’hui. Mais la nature que je contemple n’est plus intacte. L’objet du regard a changé .

Le sublime romantique s’est fissuré : il laisse désormais entrevoir une fragilité irréversible.
II. La nature en péril : vers une esthétique de la disparition
Face au réchauffement climatique, la beauté des glaciers devient paradoxale. Elle captive, oui — mais elle alerte. C’est cette tension entre l’admiration et l’inquiétude qui transforme l’acte photographique en témoignage engagé.

Les glaciers fondent, les lignes de crête se fissurent, les neiges se font rares. Le sublime n’est plus une promesse d’éternité, mais un signal d’alerte. Mes images documentent cette transformation, souvent invisible à l’œil nu mais pourtant irréversible.

Ce changement donne à ma démarche une nouvelle gravité : mes photographies deviennent autant des actes de mémoire que des gestes artistiques. Chaque image devient un témoin, un fragment de ce qui était, et peut-être de ce qui ne sera plus.

Dans cet entre-deux entre contemplation et disparition, se dessine une nouvelle forme de romantisme. Ni naïf, ni nostalgique, il cherche une voie d’expression lucide et sensible. C’est ce que je nomme le "romantisme écologique".

III. Le romantisme écologique : une sensibilité engagée
Ce romantisme contemporain n’est plus tourné vers une nature idéalisée. Il s’ancre dans un réel abîmé, vulnérable, et réclame une posture nouvelle : celle du témoin sensible, du veilleur, du médiateur.
En tant que glaciographe, je m'imagine comme un passeur.
Inspiré par l'art japonais du mono no aware, je cherche à faire ressentir — plus qu’à démontrer — ce lien invisible entre émotion, esthétique et conscience écologique.

Ce romantisme nouveau ne fuit pas le monde moderne ; il y plonge ses racines pour y chercher des formes de résonance, de soin, de transmission. Il ne se contente pas de montrer ce qui est beau : il interroge ce que nous sommes en train de perdre et nous invite à ralentir, à ressentir, et à protéger.
Dans ce regard à la fois artistique et engagé se tisse une réponse possible à notre époque troublée.
Photographier devient un acte de présence.
Contempler devient un acte politique.

Et peut-être, au croisement de l’art et de l’écologie, peut-on encore espérer toucher les consciences.
Photographier les glaciers aujourd’hui, c’est s’inscrire dans une double tradition : celle du regard romantique, hérité des peintres visionnaires qui savaient voir la Nature comme un miroir de l’âme ; et celle, plus urgente, de l’engagement écologique face à un monde qui vacille.

Le romantisme écologique que je revendique est une tentative de réconcilier ces deux dimensions. Il est une invitation à habiter le monde avec plus de douceur, plus d’émerveillement, mais aussi plus de responsabilité.

Car ce que mes photographies cherchent à dire, c’est peut-être ceci : Ce que nous aimons vraiment, il est encore temps de le préserver.
Pour conclure, je crois que le principal récit de réenchantement c’est d’offrir un regard nouveau sur le vivant, capable de susciter l’émotion, l’émerveillement et l’engagement.
De façon plus générale, en racontant cette beauté menacée, j’ai l’espoir de raviver un lien intime entre l'Homme et la Nature.

Si vous avez des projets photographiques, si souhaitez me faire découvrir des paysages ou partager des aventures qui vous tiennent à coeur, n'hésitez pas à me contacter pour en discuter.
Je suis également disponible pour mener des actions de sensibilisation dans des écoles, des entreprises, des manifestations, des séminaires et ailleurs encore.
Olivier, j’aime ta démarche, car elle est sensible. Elle parle à tous nos sens, en particulier celui du beau, qui nous émeut. L’émotion ouvre des portes que la raison, trop froide, ne passerait peut-être pas, sinon. Plus que sa chaleur, l’émotion apporte sa douceur, sa lenteur. L’art engagé souvent, presque toujours, cherche à heurter, à choquer, à provoquer, il éveille brièvement puis on s’en détourne vite, car dans son miroir le monde et nous-mêmes sommes laids. J’aime l’approche de ton romantisme écologique, car dans ton regard le monde est beau. Grâce à la magie des images, il semble immortel, le temps, infini, de la contemplation. La raison en connait la fragilité, aussi grâce aux témoignages sensibles, comme le tien. Une…
Toujours un récit très intéressant et de très belles photos,bravo à vous Olivier👍👍👏😍